mardi 8 mai 2012

J'écris à l'absent


J'écris à l'absent. Celui qui ne lit pas, qui ne lit plus ou n'a même jamais lu.

Je voudrais lui dire que c'est sans importance ; les mots que j'ai inscrits ici ne sont que chimères et impostures. Ce sont des apocryphes, des mythes, des légendes de moi-même. J'ai menti sans le vouloir : j'ai cru aimer, j'ai cru souffrir, j'ai cru me souvenir. J'ai menti en pleine conscience : j'ai inventé, j'ai imaginé, j'ai fabulé.

Je voudrais lui dire que ça ne fait rien ; qu'il n'y a ici que des insomnies et des larmes et qu'il aurait pu craindre que je ne sois faite que de cela. 

Je voudrais lui dire que je ne lui en veux pas ; je ne m'attendais pas à ce qu'il lise. Je n'ai jamais prétendu écrire de la littérature. J'ai écrit pour moi avant toute chose. Et pour les autres. Ceux qui ont des fêlures. Et j'écrirai encore. Ce sont des mots thérapeutiques.

Je voudrais lui dire, enfin, que je le comprends ; il n'y a rien de mal à ne pas aimer. Et que l'amour est, somme toute, relatif.- Moi-même, j'ai du mal à m'aimer et à aimer -  Je suis perdue, tu vois, depuis toujours. Je me cherche à travers l'écrit, et seul un autre égaré peut se retrouver dans mes errements.

Ce n'est rien, juste la vie. Tu as bien fait de passer ton chemin et je te souhaite la plus belle et longue route qui soit.

mardi 17 avril 2012

Le cri

Je marche seule, à l'heure où l'asphalte se confond avec le soir. Mon pas est rapide et nerveux. Je ne sais pas où je vais, ni même où je m'arrêterai, mais je marche, je cours même, presque.

Je fuis.

Il y a ce visage blafard qui me fixe à travers les sillons noirs de la nuit, ses yeux luisent et sa silhouette grandissante s'élève sur moi, comme un titan de ténèbres. Je me suis retournée et je l'ai vu. Je me suis encore retournée, et il était encore là. Alors, j'ai marché, j'ai couru et je cours toujours. Je suis pieds nus pourtant, et le sang afflue sous moi. Je peux sentir des hématomes et des éraflures sur tout mon corps. Parfois même, le bitume me prend. Mes chevilles se tordent sur le gravier de la route. Et je m'effondre. Je me relève. Mais il est là. Plus près encore. Il surplombe mon être de son regard livide.

Le voyez-vous vous aussi ? Le voyez-vous, vous aussi, le visage hurlant de la lune ? C'est Munch qui répand son cri à travers l'univers. Il hurle. Il hurle d'un cri infini :

« Papa est malade ».