mercredi 11 novembre 2009

Ci-gît l'hier


Hier s'est dissout dans l'imprécision. Il n'est plus qu'une masse informe et l'étrange expérience de la disparition. Les notes se sont défaites, les pas se sont perdus et il n'y a plus de musique que la cacophonie des paroles incertaines. Il n'y a plus que ce ballet désarticulé de visages évasifs. Plus que cette nuit, au milieu de leurs ovales indistincts, plus que ces silhouettes hantées par le lointain.
Derrière moi, tout est flou, je doute du réel, je doute de l'irréel. J'accuse mon imagination, à tort ou à raison. Il n'y a qu'une chose dont je sois sûre, c'est la fuite des souvenirs et l'évanescence des jours.

Je me suis évaporée dans l'Hier. Et tous ceux que j'ai aimés aussi. Il me semble qu'ils ont désormais les traits de l'inconnu qui passe. Celui que je croise, au détour d'un quai de gare, sans heurts, sans pleurs, sans coeur.

Noir


Ma pupille noire se dilate sur le monde et endeuille mon horizon.
J'ai des cercueils indélébiles terrés sous mon regard. Des violons grinçants sur des airs épuisés; des feuilles d'automne déchues ; des balançoires vides; et le vent glacé du ciel. J'ai des mots qui sonnent. Ce sont des épitaphes, ce sont des oraisons funèbres, ce sont des marches silencieuses. Ils résonnent comme le glas assourdissant de la foi. Peu importe que je parle, que je ris et que j'aime, je suis toujours dans un cimetière. Je regarde ce fossoyeur qui creuse, qui emplit et désemplit les tombes. Le Temps. Et j'ai le vertige quand je me penche au-dessus. J'ai peur du vide. Car le vide est peuplé par la mort.